الاثنين، أكتوبر 02، 2006
Souci Existentiel
"Les gens sont tellement différents, mais en même temps sont tellement pareils… Des fois on a uniquement envie que tout le monde soit claire et dis directement ce qu’il pense, mais on n’a pas tout ce qu’on veut dans la vie, c’est en grandissant d’ailleurs qu’on s’en rende compte.
Oui, malheureusement on grandit, et on découvre que tout ce qu’on nous a appris sur les valeurs humaines qu’on doit appliquer est faux, on se voit donc obligé de rebâtir notre personnalité et adapter nos principes à la réalité existante"
Je viens de finir l’introduction à ma dissertation, celle que nous a demandé le professeur de philosophie pour la semaine prochaine. En fait, ce n’était pas une dissertation normale, comme les autres, non, il nous a demandé d’écrire une dissertation portant sur notre souci existentiel dans cette période de la vie, et ce qui est ironique c’est que mon souci existentiel est mon existence elle-même !
Mon professeur de philosophie est un homme surprenant, la manière dont il analyse les chose, dont il interprète chaque geste, chaque symbole, chaque signal de la personnalité me laissent à chaque fois ébahie par sa merveilleuse perception des choses. Bien évidemment, il ne suffit pas de 2h par semaine pour connaître tout ceci de lui, d’ailleurs, je l’attends maintenant dans le café où on s’est rencontré la première fois, en buvant mon café noir ma cigarette à la main.
La première question qui se pose est comment se fait il qu’une étudiante voit son professeur dans un café ! Oui, je sais bien que ça parait louche, mais c’est DuThoit, Albert DuThoit dont on parle, et ce qui est sure c’est que cet homme n’est pas un professeur ordinaire.
Je me rappel très bien que je le voyais toujours assis à une table au fond de ce même café, sa tasse de café toujours devant lui, au même endroit à chaque fois, et son cendrier plein de mégots de cigarette, comme toujours. Quand je venais avec des amis à ce café, il m’intriguait toujours, je me demandais souvent à quoi est ce qu’il pouvait penser, j’imaginais sa vie, sa maison, j’arrivais même à lui créer plusieurs vies et choisissait à chaque fois une différente… Je m’étais construite tout un monde dans mon esprit juste pour lui, DuThoit.
Je ne lui avais jamais adressé la parole même si c’était presque devenu ma raison pour laquelle je me réveillais chaque matin. Je n’oublierais jamais le jour où j’ai su comment il s’appelait, je me rappel de chaque petit détail, car c’est à partir de ce jour là que ma vie a pris un tout autre tournant : c’était un lundi, le premier jour des études, j’étais en 3eme année, très peu motivée pour tout, je détestais tout (peut être que je le fais toujours), et on avait un cours de philosophie, je m’étais dit qu’on passera encore deux heures de sommeil, et qu’on ressortirais enfin pour aller au cours de « Comportement du consommateur » pour passer un autre couple de deux heures de sommeil. Je m’étais assise en arrière de l’amphi, comme je l’avais toujours faite. DuThoit montait vers l’arrière, vers moi, et pourtant, même si nos regards se sont croisés, j’ai mis ma tête sur mes bras croisés pour dormir. Sans me rien dire, il s’est assis à côté de moi et cria pour que tout l’amphi écoute :
« - Je suis votre professe de Philosophie comme vous le saviez déjà, mon nom est Albert DuThoit. Je me passerais de vous exhiber mon CV encore moins ma liste de diplôme, après tout, qu’est ce qu’une feuille attestant d’avoir une ou plusieurs doctorats dans un quelconque domaine si, comme cette personne endormie à côté de moi, on a passé toute notre vie à dormir ? »
Tout en levant ma tête doucement, je m’étais rendue compte qu’il me regardait toujours, ma surprise fut grande lorsque j’ai réalisé que ses regards n’étaient pas du tout sévères ! Il s’était levé pour aller près du bureau, lorsqu’il descendait les marches, j’analyser les mots qu’il avait choisi : exhiber au lieu de montrer ou citer, feuille au lieu de diplôme, cette personne endormie au lieu d’un qualificatif sévère, et puis toute notre vie au lieu de toute sa vie…
Une fois devant, DuThoit, tout en gardant son regard fixé au mien, il redit :
« - Merci Melle d’avoir eu du respect pour moi. Je voudrais dire à vous tous que je ne noterais pas d’absence pendant toute l’année, élèves non intéressés s’abstenir, je donnerais aussi une note minimale de 10, même si vous n’êtes jamais venu… Les élèves qui croient qu’ils seront incapables d’avoir plus de 10 alors qu’ils s’en aillent, ainsi que tous ceux qui ne sont pas du tout intéressés par la philosophie, merci. »
Je m’étais levée pour sortir, mais une fois arrivée prés de la porte, DuThoit me dit :
« - Attendez Melle… ?
- Johanne AKIRA
- Melle AKIRA, sortez vous car vous n’êtes pas intéressé ou bien parce que vous ne pensez pas avoir une note supérieure à 10 ?
- Y a-t- il uniquement deux choix de réponse ? »
Le reste de l’amphi (il restait environ 43 personnes de 116) riait, car j’avais répondu d’un ton très ironique.
« - Effectivement
- Je dirais parce que je ne sais pas. Il y a toujours une réponse secours dans toutes les situations
- Je vous demanderez de rester (me dis-t- il calmement) »
La surprise apparaissait clairement sur mon visage, mais sans protester. J’allais revenir à ma place quand il me dit :
« - Je vous prierais de vous assoire devant, là, au milieu, devant moi. »
J’ai fait ce qu’il me dit et je m’étais assise là où il m’a demandé de le faire. J’ai pris un stylo et une feuille, non pour noter ce qu’il disait, mais juste pour gribouiller.
Dès que les élèves qui ont décidé de rester s’étaient installés, DuThoit s’est avancé tout près de ma table, il s’est arrêté un moment puis il dit :
« - Je vous demanderez à tous pour commencer de prendre un bout de papier, d’y écrire un mot, le premier qui vous passe par la tête, peu importe la langue puis d’écrire votre nom ou et votre prénom, peu importe, puis je passerais les prendre un par un »
J’ai déchiré un bout de papier de la feuille dans laquelle je griffonnais, le bout était d’ailleurs taché, j’ai écrit le mot « agonie » suivi de mon nom AKIRA en majuscule en bas à gauche. Vu que j’étais assise seule dans la première rangée, DuThoit est passé me prendre la feuille en premier. Je la lui avais donnée pliée en quatre. En l’ouvrant, il m’avait dit :
« - Vous avez plié votre feuille en quatre, les plis ne sont pas proportionnels, la feuille est sale et pleine de gribouillis, ceci indique que votre personnalité est d’une complexité surprenante, je m’explique, vous n’êtes pas une personne ordinaire, vous allez toujours plus loin que les autres en matière d’esprit et de raisonnement. Le mot que vous avez choisi confirme mes propos, « agonie » est un mot bien triste et même macabre pour une jeune personne de votre âge, encore plus pour une fille. Vous avez écrit le mot centré entre guillemet, ce qui veut dire que malgré le désordre dans vos pensées, vous aimez toujours avoir des idées far, des idées principales qui sont clairement exposées dans votre vie, des idéologies même, autours desquelles gravitent toutes les autres idées, émotions, vie. Vous avez écrit uniquement votre nom, cela veut il dire que vous n’aimez pas votre prénom ? Je doute fort que ce soit aussi simple que ça, ça doit sûrement être beaucoup plus complexe, du genre que vous reniez celui ou celle qui vous a donné ce prénom peut être. Aussi, en écrivant votre nom en majuscule tout entier, vous montrez votre fierté par rapport à vos origines, ou par rapport à votre père, en supposant que vous portez le nom de celui-ci. Me tromperais-je Johanne ? »
I m’avait quand même appelé par mon prénom !
En fait, au fond de moi, à cet instant même, je savais qu’il avait raison, mais je m’étais forcée à croire que tout ceci n’étais qu’une fade explication apprise par cœur pour impressionner ses étudiants le premier jour. Mon hypothèse était vite tombée à l’eau en voyant que pour les autres élèves il ne consacrait pas aussi de temps qu’il avait fait pour moi, aussi ses explications et analyses restaient superficiels, non parce qu’il ne savait pas, mais parce qu’il ne s’y intéressait pas, parce qu’il n’y prêtait aucune attention.
Notre première confrontation était ainsi, un défi depuis le premier geste, depuis la première parole, et pourtant…
Voilà DuThoit qui rentre au café, il avance lentement et calmement vers ma table, s’assoit et me dit :
- Bonsoir Joe
- Bonsoir DuThoit
- Tu ne veux toujours pas m’appeler par mon prénom même si cela fait un an et demi qu’on se connaisse ?
- Ca me plait de vous appeler par votre nom.
- Je le sais bien (avec un sourire discret)
J’ouvris une nouvelle boite de cigarette, je proposai une à DuThoit qui l’a bien sure prise. Ca m’amusait le fait qu’on fume ensemble en buvant l’expresso qu’on commande à chaque fois, et il le savait, il savait que ça m’amusait.
- Que faisais tu avant que je ne viennes ?
- Comme d’habitude, fumer ma cigarette en pensant…
- A moi ?
- Oui.
Il me regarda sans expression, et je le regardais de même, comme si ce qu’on venait de dire était une chose normale, comme le fait de dire « passe moi le sel s’il te plait ».
- Je pensais au premier cour que vous nous aviez donné en 3eme année.
- Il te plaisait tellement, même si à cette époque, tu me détestais…
- Je ne vous ai jamais détesté. Je ne vous aimais pas, et c’est différent.
Nos deux visages ne laissaient trahir en aucun cas nos vraies émotions, cette neutralité et cette froideur qui se dégageaient d’eux ne faisaient que rendre les choses encore plus attrayantes.
DuThoit jeta un coup d’œil furtif vers la feuille dont laquelle j’avais gribouillé l’introduction pour ma dissertation, il a tout de suite su de quoi il s’agissait.
- Je pourrais jeter un coup d’œil ?
- Non. Sinon à quoi cela servirait de la recopier au propre puis de vous la remettre la semaine prochaine ?
- Peut être pourrais-je t’aider…
- Je connais déjà mon souci existentiel. Je vous remercie pour votre aide en tout cas (en lui adressant un sourire enfantin)
- Tu gardes toujours quelques émotions pures…
- Peut être est ce une part de mon souci existentiel.
- C’était un compliment.
Je l’ai juste regardé profondément avec un très léger sourire au coin des lèvres.
- Que compte tu faire ce soir ?
- Terminer ma dissertation. Je ne veux pas avoir du travail à faire pendant le week-end.
- Tu as un programme alors ?
- Pas vraiment.
- Tu devrais peut être accepter.
- Accepter quoi au juste ? (avec un ton qui frôlait à peine le mécontentement)
- Je ne peux pas éviter ce sujet plus longtemps.
- Je ne veux pas parler d’elle maintenant. Je ne veux pas gâcher la soirée.
- Tu le devrais pourtant. Tu ne peux pas fuir, et tu le sais. Joe, tu dois l’affronter.
- Pourquoi me proposer alors d’accepter ?
- Pour l’affronter. Si tu accepte de partir avec elle, au moins ce week-end là bas, toutes les deux, vous allez régler vos différents
- Vous connaissez fort bien son tempérament, d’ailleurs, vous en avez eu un avant goût cet été.
- Et c’est exactement pour ça que je voudrais que tu acceptes son invitation. Le départ n’est pas une solution.
- Je ne lui demande rien, son argent je ne l’accepte pas, ce que je veux c’est la paix…
- L’as-tu cette paix ? De cette manière ? Tout ce que tu as fait est fuir en laissant enfoui tout ton passé, en reniant ce qui te liait à elle.
- Ca me va pour l’instant.
- Paroles.
- Je vous assure que je ne me suis jamais sentie aussi à l’aise depuis qu’il…
- Tu lui en veux pour tout ce qu’elle t’a fait…
- Ne me faîtes pas passer pour une martyre, je n’aime pas ce rôle. Tout le monde souffre d’une manière où d’une autre. Je n’arrive plus à accepter ma vie avec elle, c’est pour ça que je suis partie, non pas parce que je suis une martyre ou que je subissais ses supplices.
- Il faudra quand même en parler avec elle.
- Peut être une autre fois, dans une semaine, dans un mois ou dans des années…
- Je ne veux pas que tu gardes cette haine… Je ne veux que ton bien (en me tenant la main sur la table)
J’ai retiré ma main en me servant de la cigarette comme prétexte, mais vu que c’est DuThoit, il me dit :
- Dès que je te parle d’elle, tu m’évites, même du regard… Me déteste tu aussi en te parlant d’elle ?
- Je n’arriverais pas à le faire même si je le souhaitais. (en souriant avec supériorité)
- Cette expression de ton visage… (en me caressant la joue)…
- Qu’est ce qu’elle a ?
- Oublie.
En fait, je n’arrivais pas à donner à notre relation une étiquette bien déterminée, je n’arrivais pas à dire ce que nous étions l’un pour l’autre précisément, et peut être que c’est pour cette raison qu’on se trouve là, dans ce café, avec une cigarette chacun entre les doigts…
Je me rappel que lorsque j’avais terminé mon premier cour de philosophie l’année dernière, j’étais partie avec des amis à ce même café que DuThoit côtoyait. Lorsque son heure habituelle – environ 20h30 – est arrivée, il est entré pour aller s’assoire à sa table. Sans lui demander ce qu’il voulait boire, le serveur lui a directement apporté son expresso Lavazza. Il prit une cigarette du paquet, puis l’alluma. Il portait un jean noir simple et une chemise noire tout aussi simple, son style habituel, même à l’Université.
Je n’arrivais pas à m’empêcher de le regarder, parce qu’il m’intriguait toujours ; pour moi, il représentait une énigme, un mystère que je devais résoudre… et pas uniquement ça, peut être plus, même à cette époque où je ne l’appréciais pas, sûrement à cause de mon premier cour avec lui.
Quelques instants après, il m’avait aperçu ; j’étais avec trois amis : Shannon, Chris et Cole. Cole m’enlaça en voyant que les regards de DuThoit se dirigeaient à présent vers moi. DuThoit continua à me regarder. Cole, gêné, m’avait dit :
« - Qu’est ce qu’il a à te regarder celui là ?
- C’est mon prof de philosophie.
- Ah bon ? Il est nouveau ?
- Oui. Tu n’es pas entré aujourd’hui, tu ne l’as pas vu.
- Non mais quel prétentieux il fait ! (lui dit Shannon)
- C’est vrai. Il a dit que tout ceux qui veulent sortir qu’ils le fassent, et il leur donnera une note de 10 (lui dit Chris qui caressait le visage de Shannon)
- Pourquoi tu n’es pas sorti alors ? (me dit Cole)
- Il m’a retenu.
- Il a le droit ?
- Je n’en ai aucune idée. En tout cas, je sens que ce n’est pas un prof ordinaire. D’ailleurs, il nous a demandé…
- Oh, épargne nous son cours, on est sorti pour éviter ça justement ! (me dis Shannon) »
Je m’étais alors tue. Je pris une cigarette mais je me rendis compte que je n’avais pas de feu. Shannon détestait les femmes qui fumaient, elle me disait toujours qu’elles perdent leur féminité ; Chris n’était pas un fumeur, son type est plutôt le gentil gars qui veut se faire passer pour un cool ; quant à Cole… Que vais-je dire de lui maintenant ? C’était quelqu’un de vraiment bien, vraiment. Il essayait d’arrêter de fumer, ce qui fait qu’il n’avait pas de feu.
Je suis allée chez le serveur qui se trouvait à deux tables de celle de DuThoit, en lui demandant du feu, DuThoit m’appela :
« - Johanne ! »
J’étais plutôt surprise qu’il se rappel de mon prénom (même s’il savait que je détestait mon prénom), et ce qui m’étonna encore plus c’est qu’il m’ait remarqué, tout à fait comme j’avais fait depuis la première fois que je l’avais vu dans ce café.
Je me suis approchée de sa table, il m’a tout simplement tendu du feu ; j’allumai ma cigarette puis je voulu partir.
« - Tu peux rester si tu veux
- Je… ne vous… dérangerais pas ?
- Pourquoi dis tu cela ?
- Et bien, vous vous assoyez chaque soir seul, peut être en méditant, et si je m’assois je dérangerais le cours de vos pensées.
- Tu médites aussi, même en étant entourée, comme tu as fait chaque soir dans ce café même, n’est ce pas ? »
Je m’étais assise, vu que la discussion semblait à peine commencer…
« - Tu ne viens pas souvent avec ces gens là, n’est ce pas ?
- Vous avez raison. Ils n’aiment pas ce café.
- Tu l’aimes ?
- Oui, je le trouve bien, je m’y sens à l’aise »
Il sourit. Je compris alors que peut être il ne me parlait pas du café, mais de Cole. Je rougis un tout petit peu, et il eut encore un sourire.
- Tu t’es évadé ? (me dis DuThoit)
- Oui (en souriant avec nostalgie)
- A quoi pensais tu ?
- A notre première discussion dans ce café.
- Elle était brève, n’est ce pas ?
- Oui, mais pleine de sens.
- Ne dit on pas que le silence est la mère des langues !
- C’est vrai. On était resté à ne rien dire, mais on communiquait.
J’ai jeté un coup d’œil à ma montre.
- C’est 21h45. (me dis DuThoit)
J’ai souri. Il prédisait chacun de mes gestes, il devinait chacune de mes pensées.
- Partons si tu veux
On s’est séparé à la porte du café. Il voulait m’accompagner, ou me déposer avec sa grosse bécane mais je voulu marcher, seule, pour penser à ce que j’allais faire avec elle…
Je m’étais approchée de mon immeuble, un vieux et grand immeuble qui contient 35 appartements. Je n’oserais pas dire que tout le monde le trouvait beau, loin de là, mais moi je le trouvais ainsi. Je m’y sentais à l’aise et c’est ce que tout le monde cherche. J’avais un tout petit appartement de deux petites chambres, un hall qui servait de salle à manger et une salle de bain avec baignoire. Ca me suffisait amplement. J’étais au dernier étage, et même s’il n’y avais pas d’ascenseur je ne m’en plains pas. La vue qu’offrait le hall ainsi que les chambres était magnifique, on pouvait voir toute la ville et la forêt qui l’entourait. C’était tout simplement beau comme a dit DuThoit lors de sa première visite chez moi.
J’ai pris cet appartement il y a à peine un mois, juste après ma crise avec elle. Je n’en pouvais plus et donc je suis partie. C’était très difficile pour moi de trouver un appartement avec un prix convenable, aussi je ne pouvais m’offrir un appartement en centre ville vu que je n’en ai pas les moyens.
Je refusais chaque chose venant d’elle, même son argent, je l’ai refusé à maintes reprises. Pour pouvoir vivre, j’ai trouvé un travail après l’université : je suis assistante dans un bureau d’étude spécialisé en Marketing et Management. Il faut dire que ce travail m’aide à rester à jour sur ce qui se passe réellement dans le monde de l’entreprise, et non uniquement se contenter des cours théoriques. Malgré ça, je n’ai pas un très bon salaire, vu que ce n’est qu’un travail à mi-temps (je ne travaille que 4heures par jour), mais ça me permet de vivre et de payer mon loyer sans recourir à ses aides financières.
Cole, lui, n’avait pas aimé mon appartement, il m’avait proposé d’aller vivre avec lui sans payer de loyer vu que ses parents lui avaient offert la maison dont laquelle il vivait, mais j’ai bien sure refusé, je ne me permettrais jamais de vivre sur les frais de qui que se soit, même DuThoit…
En parlant de Cole, il m’appelle toujours. C’est quelqu’un de bien. Il s’accroche encore et sans relâche ; j’admire en lui cette vertu : se battre jusqu’au bout pour avoir ce qu’il veut.
A la maison, j’ai pris la feuille où j’avais transcrit l’introduction pour la continuer ; je cherchais un stylo, puis je me suis mise à écrire :
« Les gens sont tellement hypocrites ; je ne comprend vraiment pas comment ils peuvent garder le sourire devant quelqu’un qu’ils détestent plus que tout ; ils arrivent même à rire avec cette personne en sachant qu’ils se détestent mutuellement ! Et cette capacité de cacher leur souffrance, leurs problèmes et continuer à jouer cette comédie minable de la vie parfaite devant les gens est vraiment incroyable. Des fois, j’arrive même à admirer ces hypocrites, car pour moi ce n’est pas facile de rire lorsque j’ai envie de pleurer, ni de sourire lorsque je suis triste… Je suis quelqu’un de vrai, qui recherche des sensations et des émotions vraies ; et voici là un autre sous souci existentiel.
Peut être que ce qui nous a été demandé dans cette petite dissertation n’est pas d’exprimer nos soucis ou nos sous soucis, mais d’écrire sur un seule et unique souci, NOTRE souci existentiel ; j’avoue que c’est très difficile pour moi d’en trouver un seule, et je résumerais donc que mon souci existentiel est la somme de tous mes soucis ; mais quels soucis ai-je donc dans cette vie ? Je répondrais avec la simplicité dont ma personnalité se caractérise (et en voici un autre sous souci existentiel) : mon souci existentiel est mon existence elle-même. »
Minuit passé, je me trouvais sur le lit, allongée sur mon dos, regardant le plafond… Je pensais en fait à ce que m’avait proposé DuThoit, d’accepter. Aurais-je assez de cran, assez de courage pour pouvoir rouvrir les plais dont je n’avais pas encore guéri ? Cela ne fait qu’un mois que je suis là, pourrais-je l’affronter de ci tôt ?
Mon portable sonna. Je commençais à détester ces téléphones qui nous sortent de notre précieux monde de pensée… C’était le numéro de Cole.
- Allo
- Akira… je ne te réveille pas au moins ?
- Non, j’étais réveillée.
- Je… suis en bas, est ce que je pourrais monter te voir ?
- Oui, si tu es en bas
- D’accord, je monte.
Je ne sortais plus avec Cole, depuis cet été. Ca fait de cela environ 6 mois. Il était quelqu’un de bien, mais ça ne servait à rien de me mentir moi-même et de lui mentir aussi en restant avec lui… J’avais continué avec lui pendant toute l’année dernière, l’année pendant laquelle j’ai connu DuThoit, et je continue à le connaître. Même pour Cole c’était bizarre ; à chaque fois où il m’appelait pour me voir, j’étais avec DuThoit, soit à notre café, soit chez lui.
Cole frappa discrètement à la porte. Je me suis levée doucement du lit et suis allée lui ouvrir. Bien sûre il était très bien habillé, comme toujours, bien soigné, bien rasé, bien coiffé… ainsi que tous les qualificatifs qui peuvent rejoindre le mot « bien », alors que moi j’étais en caleçon avec des nounours comme motifs et un débardeur blanc… Il m’a embrassé sur la joue.
- Mais entre Cole.
- Tu es sure que je ne te dérange pas, n’est ce pas ? (en entrant)
- Oui, oui, j’étais encore réveillée.
- Je… passais par là, et je m’étais dit de passer te faire coucou.
- C’est gentil de ta part. Que veux tu boire ? (en ouvrant le réfrigérateur qui était au hall) Une bière ? Limonade ? Thé glacé ?
- Je ne prendrais rien, merci.
- Allez Cole !
- Que prendras tu ?
- Une bière. Tu as envie de prendre une avec moi ?
- Oui, alors une bière.
Je lui ai tendu une bière et j’en ai pris une. Mon paquet de cigarette était sur la table, j’en ai pris une, et j’ai tendu une à Cole.
- C’est dommage que tu as repris, tu ne fumais plus pendant un an.
Cole avait repris depuis qu’on s’était séparé, mais je ne l’ai su qu’après. Il ne voulait tout de même pas que je me sente coupable car je l’ai laissé tomber… Je pense encore que j’ai fait le bon choix, il n’était pas heureux avec moi, avant même que je ne connaisse DuThoit, et après ça avait empiré.
- Akira ?
- Pardon, tu disais ?
- Non, rien.
- Excuse moi s’il te plait. Je pensais à un truc.
- A DuThoit ?
- Non. (en reprenant une autre cigarette)
- Akira… Tu ne voudrais pas voyager ce week-end ?
- Je ne sais pas encore… Peut être que je devrais aller chez… elle.
- Ta mère ?
- Oui. (en joignant mes pieds à mes mains)
- Elle t’appelle toujours ?
- Oui. Elle veut que je parte avec elle ce week-end en Espagne.
- L’Espagne est un joli pays.
- Je ne sais pas si je peux la revoir.
- Ne t’oblige pas.
- DuThoit m’a dit qu’il fallait que je l’affronte pour régler nos différents.
- Bien sûre, DuThoit t’a dit !
- Ne sois pas si agressif s’il te plait. Je ne faisais que te raconter.
- Je suis désolé. Je trouve que c’est trop tôt… Après tout ce qu’elle t’a fait, ce n’est pas facile de la revoir après un mois que tu as quitté la maison.
- Je ne sais vraiment pas quoi faire. Je voudrais l’affronter, lui dire tout ce que je pense, sincèrement. Je ne lui avais rien dit avant. J’avais tout simplement dit que je partais vivre ailleurs.
- N’accepte pas ce voyage, il est encore tôt. Viens plutôt avec nous, on pars ce week-end à l’Ille, pour nager…
- Mais on est encore en Avril…
- Et alors ?
- La mer, ça ne me dis rien, tu le sais (en souriant), je préfère les montagnes.
- Ca te changera les idées. Allez, viens avec nous.
- Je ne pense pas Cole. (en souriant gentiment)
- Tu veux peut être passer ce week-end avec DuThoit, en amoureux
- Tu ne comprends pas Cole… On ne sort pas ensemble…
- Tu sors avec lui, tu passes des soirées entières avec lui, tu pars chez lui et tu y passes la nuit, et tu t’attends à ce que je croie que tu n’es pas sa petite amie ?
- Oui, je ne nie pas tout ceci, mais cela ne veut pas dire que je suis sa petite amie.
- Alors il passe du temps avec toi, c’est tout.
- Ecoute Cole, je ne pourrais pas t’expliquer ce qui est entre nous, vu que moi-même je ne sais pas. Ce dont je suis sûre c’est que je ne suis pas sa petite amie, et il ne se joue pas de moi, car on n’a rien fait.
- Ca fait une année et demie que vous vous connaissez, et depuis l’été tu es libre, alors ne me dis pas qu’il n’a pas couché avec toi !
- Cole, tu sais très bien que je ne vais pas me justifier devant toi. Crois ce que tu veux, je n’ai pas à prouver quoi que se soit.
- Tu m’as quitté pour lui…
- Non, on s’est séparé car je ne te sentais pas heureux avec moi, même avant que je ne connaisse DuThoit, et après que je l’ai connu, j’ai réalisé que je me mentais moi-même et je te mentais toi aussi, car je n’étais pas amoureuse de toi, je t’aimais bien, oui, tu m’étais très cher, mais je n’étais pas amoureuse de toi, c’est pour ça que j’ai arrêté le carnage…
- Le carnage ! Ton humour noir apparaît toujours ! Le carnage c’est ce que tu m’as causé après notre séparation, que DuThoit a bénît, car le champ lui serait libre !
Mes regards s’étaient attristés, j’ai posé ma tête sur mes genoux que je tenais toujours entre mes bras. Quelques instants après, après que Cole ait réalisé ce qu’il m’avait dit, il s’approcha de moi en me serrant contre lui.
- Je suis désolé Akira… Ne m’en veux pas s’il te plait.
Je ne lui répondais pas. Je me disais tout simplement que peut être il avait raison, que le carnage était après la séparation, et non pendant la relation… Peut être devais-je rester avec lui… Peut être n’avais je pas fait le bon choix après tout… Ce que j’ai voulu éviter s’est passé quand même… Après 6 mois de séparation, il éprouve encore ce sentiment que je voulais lui éviter.
- Ce n’est pas grave.
- Je… Je ne voulais vraiment pas dire tout ça…
- C’est important d’exprimer ce qu’on ressent vraiment, de dire ce qu’on pense réellement.
- Peut être qu’il ne fallait pas que je passe ? (en s’éloignant de moi)
Je levai la tête en le regardant tristement.
- Tu veux couper contact avec moi ? Tu ne veux plus me parler ?
- Peut être que comme ça, je ne te ferais plus souffrir.
- Arrête de vouloir me protéger tout le temps ! C’est moi qui ne veux pas que toi tu souffres, parce que tu m’es très cher…
- Akira, je souffre maintenant. J’étais bien avec toi…
- On se mentait à nous-même Cole, tu n’étais pas heureux…
- Je ne l’étais pas car tu ne l’étais pas avec moi ! Car tu étais si malheureuse, car tu avais des problèmes…
- Cole, cette discussion n’arrangera rien…
- Je maudis ce prof et je maudis le jour où tu as assisté à son maudit cour de malheur ! Quand je pensais que tu allais partir avec moi au café ce jour là, mais que tu as changé d’avis à la dernière minute !
- Peut être que ce n’est pas à cause de DuThoit…
- Tu le défends toujours et ça me tue ça ! Tu ne me laisses même pas insulter l’homme à cause de qui je t’ai perdu.
- Lui, il ne te hait pas.
- Il n’a pas de raison pour le faire.
- Cole, ne t’empoisonne pas la vie ainsi, tu es un bon vivant, alors vis.
Il s’est levé pour se diriger vers la porte. Il l’ouvrit et avant de sortir il me dit :
- Je ne vis pas, je respire seulement.
Il a claqué la porte en me laissant ainsi. Je regardais encore la porte longtemps.
Après la séparation, Cole évitait toujours qu’on parle de ça, qu’on parle de DuThoit, au point même que quand on était au café, le soir, il sortait dès qu’il apercevait DuThoit rentrer, de telle sorte à ce qu’il n’ait pas à le saluer ou même à le regarder. Ces derniers temps, il en parle plus souvent… Je ne sais pas exactement ce qu’il veut, ce qu’il cherche en m’en parlant, peut être qu’il fait ce que je voudrais faire avec elle, dire tout ce qu’il pense, pour pouvoir oublier la survie et vivre de nouveau…
Il fallait que je le fasse, je le devais, et je pense que ça ne sert à rien de retarder ma confrontation avec la femme qui est ma mère, mais qui a très mal rempli sa mission.
C’était une heure du soir, et pourtant j’ai pris le téléphone et j’appelai ma mère.
- Allo…
- C’est moi…
- Johanne ma chérie…
- Je suis désolée si je t’ai réveillé…
- Oh mais non, pas de problème…
- Je voulais juste te dire que je viendrais avec toi demain en Espagne.
- Ca me fait énormément plaisir que tu ais accepté. On passera un week-end merveilleux en deux célibataires.
- Quand est ce qu’on se voit à l’aéroport ?
- Non, non, je passerais te prendre de chez toi, dis moi juste où tu habite.
- Je n’ai pas de problème, un ami va me déposer.
- Bon, d’accord. Notre avion décolle à 9h du matin. Assure toi d’y être minimum une demie heure avant.
- D’accord.
Je n’avais pas du tout dormi cette nuit, je n’arrivais pas à fermer l’œil vu que ce qui se passera ce week-end me hante déjà. Le soleil s’était déjà levé, il était 8h maintenant. Je n’avais rien pris avec moi, juste un sac à dos dans lequel j’avais mis ma trousse à toilette, un pyjama et un pull de rechange. Je ne pris pas de maillot, je ne souhaitais pas nager, je n’avais aucune envie de m’amuser, juste de régler ce que j’avais à régler… Je l’imagine déjà qui me demande, avec son sourire qu’elle essaye de le forcer à devenir innocent, pourquoi je n’ai pas ramené de maillot !
J’ai pris le téléphone pour appeler DuThoit :
- DuThoit
- Joe ! Bonjour.
- Je ne vous dérange pas au moins…
- Joe, tu lui as parlé, n’est ce pas ?
- Oui.
- Elle t’a appelé ?
- Non, c’est moi. Je lui ai dit que j’étais d’accord.
- Tu as bien fait. Ca va t’aider… Même si j’aurais aimé que je sois avec toi lors de ta discussion avec elle.
- Tu le penses vraiment ?
- Oui. Je voudrais te protéger d’elle, de l’empêcher de te faire encore plus de mal. Je veux que tu sentes qu’il y a quelqu’un qui te supporte contre elle.
- On prendra l’avion de 9h.
- Je viens te chercher ?
- Ca ne te dérangerait pas ?
- Pas du tout. Je viens.
Il était sûrement en route maintenant. J’aurais tellement aimé qu’il vienne avec nous, je me sentirais plus confiante car il est là, avec moi, à mes côtés. Mais est ce vraiment possible ?
Lorsque DuThoit a klaxonné, je suis descendue en emportant mon sac à dos et en jetant un regard attristé à ma maison que j’aimais tellement.
DuThoit portait un sac à dos aussi, je le regardais avec une joie que je n’arrivais pas à cacher.
- Oui, je pars avec toi. Pas question de te laisser seule avec elle.
J’ai souri d’apaisement, puis je l’ai serré contre moi, comme une fille pourrait serrer son héro.
Elle m’attendait devant la porte conduisant à l’avion ; elle ne m’avait pas encore aperçu, elle nous donnait le dos. J’avais de plus en plus peur d’avancer vers elle, et les souvenirs commencèrent à refaire surface. DuThoit me tenu la main comme pour me donner de la force.
Oui, malheureusement on grandit, et on découvre que tout ce qu’on nous a appris sur les valeurs humaines qu’on doit appliquer est faux, on se voit donc obligé de rebâtir notre personnalité et adapter nos principes à la réalité existante"
Je viens de finir l’introduction à ma dissertation, celle que nous a demandé le professeur de philosophie pour la semaine prochaine. En fait, ce n’était pas une dissertation normale, comme les autres, non, il nous a demandé d’écrire une dissertation portant sur notre souci existentiel dans cette période de la vie, et ce qui est ironique c’est que mon souci existentiel est mon existence elle-même !
Mon professeur de philosophie est un homme surprenant, la manière dont il analyse les chose, dont il interprète chaque geste, chaque symbole, chaque signal de la personnalité me laissent à chaque fois ébahie par sa merveilleuse perception des choses. Bien évidemment, il ne suffit pas de 2h par semaine pour connaître tout ceci de lui, d’ailleurs, je l’attends maintenant dans le café où on s’est rencontré la première fois, en buvant mon café noir ma cigarette à la main.
La première question qui se pose est comment se fait il qu’une étudiante voit son professeur dans un café ! Oui, je sais bien que ça parait louche, mais c’est DuThoit, Albert DuThoit dont on parle, et ce qui est sure c’est que cet homme n’est pas un professeur ordinaire.
Je me rappel très bien que je le voyais toujours assis à une table au fond de ce même café, sa tasse de café toujours devant lui, au même endroit à chaque fois, et son cendrier plein de mégots de cigarette, comme toujours. Quand je venais avec des amis à ce café, il m’intriguait toujours, je me demandais souvent à quoi est ce qu’il pouvait penser, j’imaginais sa vie, sa maison, j’arrivais même à lui créer plusieurs vies et choisissait à chaque fois une différente… Je m’étais construite tout un monde dans mon esprit juste pour lui, DuThoit.
Je ne lui avais jamais adressé la parole même si c’était presque devenu ma raison pour laquelle je me réveillais chaque matin. Je n’oublierais jamais le jour où j’ai su comment il s’appelait, je me rappel de chaque petit détail, car c’est à partir de ce jour là que ma vie a pris un tout autre tournant : c’était un lundi, le premier jour des études, j’étais en 3eme année, très peu motivée pour tout, je détestais tout (peut être que je le fais toujours), et on avait un cours de philosophie, je m’étais dit qu’on passera encore deux heures de sommeil, et qu’on ressortirais enfin pour aller au cours de « Comportement du consommateur » pour passer un autre couple de deux heures de sommeil. Je m’étais assise en arrière de l’amphi, comme je l’avais toujours faite. DuThoit montait vers l’arrière, vers moi, et pourtant, même si nos regards se sont croisés, j’ai mis ma tête sur mes bras croisés pour dormir. Sans me rien dire, il s’est assis à côté de moi et cria pour que tout l’amphi écoute :
« - Je suis votre professe de Philosophie comme vous le saviez déjà, mon nom est Albert DuThoit. Je me passerais de vous exhiber mon CV encore moins ma liste de diplôme, après tout, qu’est ce qu’une feuille attestant d’avoir une ou plusieurs doctorats dans un quelconque domaine si, comme cette personne endormie à côté de moi, on a passé toute notre vie à dormir ? »
Tout en levant ma tête doucement, je m’étais rendue compte qu’il me regardait toujours, ma surprise fut grande lorsque j’ai réalisé que ses regards n’étaient pas du tout sévères ! Il s’était levé pour aller près du bureau, lorsqu’il descendait les marches, j’analyser les mots qu’il avait choisi : exhiber au lieu de montrer ou citer, feuille au lieu de diplôme, cette personne endormie au lieu d’un qualificatif sévère, et puis toute notre vie au lieu de toute sa vie…
Une fois devant, DuThoit, tout en gardant son regard fixé au mien, il redit :
« - Merci Melle d’avoir eu du respect pour moi. Je voudrais dire à vous tous que je ne noterais pas d’absence pendant toute l’année, élèves non intéressés s’abstenir, je donnerais aussi une note minimale de 10, même si vous n’êtes jamais venu… Les élèves qui croient qu’ils seront incapables d’avoir plus de 10 alors qu’ils s’en aillent, ainsi que tous ceux qui ne sont pas du tout intéressés par la philosophie, merci. »
Je m’étais levée pour sortir, mais une fois arrivée prés de la porte, DuThoit me dit :
« - Attendez Melle… ?
- Johanne AKIRA
- Melle AKIRA, sortez vous car vous n’êtes pas intéressé ou bien parce que vous ne pensez pas avoir une note supérieure à 10 ?
- Y a-t- il uniquement deux choix de réponse ? »
Le reste de l’amphi (il restait environ 43 personnes de 116) riait, car j’avais répondu d’un ton très ironique.
« - Effectivement
- Je dirais parce que je ne sais pas. Il y a toujours une réponse secours dans toutes les situations
- Je vous demanderez de rester (me dis-t- il calmement) »
La surprise apparaissait clairement sur mon visage, mais sans protester. J’allais revenir à ma place quand il me dit :
« - Je vous prierais de vous assoire devant, là, au milieu, devant moi. »
J’ai fait ce qu’il me dit et je m’étais assise là où il m’a demandé de le faire. J’ai pris un stylo et une feuille, non pour noter ce qu’il disait, mais juste pour gribouiller.
Dès que les élèves qui ont décidé de rester s’étaient installés, DuThoit s’est avancé tout près de ma table, il s’est arrêté un moment puis il dit :
« - Je vous demanderez à tous pour commencer de prendre un bout de papier, d’y écrire un mot, le premier qui vous passe par la tête, peu importe la langue puis d’écrire votre nom ou et votre prénom, peu importe, puis je passerais les prendre un par un »
J’ai déchiré un bout de papier de la feuille dans laquelle je griffonnais, le bout était d’ailleurs taché, j’ai écrit le mot « agonie » suivi de mon nom AKIRA en majuscule en bas à gauche. Vu que j’étais assise seule dans la première rangée, DuThoit est passé me prendre la feuille en premier. Je la lui avais donnée pliée en quatre. En l’ouvrant, il m’avait dit :
« - Vous avez plié votre feuille en quatre, les plis ne sont pas proportionnels, la feuille est sale et pleine de gribouillis, ceci indique que votre personnalité est d’une complexité surprenante, je m’explique, vous n’êtes pas une personne ordinaire, vous allez toujours plus loin que les autres en matière d’esprit et de raisonnement. Le mot que vous avez choisi confirme mes propos, « agonie » est un mot bien triste et même macabre pour une jeune personne de votre âge, encore plus pour une fille. Vous avez écrit le mot centré entre guillemet, ce qui veut dire que malgré le désordre dans vos pensées, vous aimez toujours avoir des idées far, des idées principales qui sont clairement exposées dans votre vie, des idéologies même, autours desquelles gravitent toutes les autres idées, émotions, vie. Vous avez écrit uniquement votre nom, cela veut il dire que vous n’aimez pas votre prénom ? Je doute fort que ce soit aussi simple que ça, ça doit sûrement être beaucoup plus complexe, du genre que vous reniez celui ou celle qui vous a donné ce prénom peut être. Aussi, en écrivant votre nom en majuscule tout entier, vous montrez votre fierté par rapport à vos origines, ou par rapport à votre père, en supposant que vous portez le nom de celui-ci. Me tromperais-je Johanne ? »
I m’avait quand même appelé par mon prénom !
En fait, au fond de moi, à cet instant même, je savais qu’il avait raison, mais je m’étais forcée à croire que tout ceci n’étais qu’une fade explication apprise par cœur pour impressionner ses étudiants le premier jour. Mon hypothèse était vite tombée à l’eau en voyant que pour les autres élèves il ne consacrait pas aussi de temps qu’il avait fait pour moi, aussi ses explications et analyses restaient superficiels, non parce qu’il ne savait pas, mais parce qu’il ne s’y intéressait pas, parce qu’il n’y prêtait aucune attention.
Notre première confrontation était ainsi, un défi depuis le premier geste, depuis la première parole, et pourtant…
Voilà DuThoit qui rentre au café, il avance lentement et calmement vers ma table, s’assoit et me dit :
- Bonsoir Joe
- Bonsoir DuThoit
- Tu ne veux toujours pas m’appeler par mon prénom même si cela fait un an et demi qu’on se connaisse ?
- Ca me plait de vous appeler par votre nom.
- Je le sais bien (avec un sourire discret)
J’ouvris une nouvelle boite de cigarette, je proposai une à DuThoit qui l’a bien sure prise. Ca m’amusait le fait qu’on fume ensemble en buvant l’expresso qu’on commande à chaque fois, et il le savait, il savait que ça m’amusait.
- Que faisais tu avant que je ne viennes ?
- Comme d’habitude, fumer ma cigarette en pensant…
- A moi ?
- Oui.
Il me regarda sans expression, et je le regardais de même, comme si ce qu’on venait de dire était une chose normale, comme le fait de dire « passe moi le sel s’il te plait ».
- Je pensais au premier cour que vous nous aviez donné en 3eme année.
- Il te plaisait tellement, même si à cette époque, tu me détestais…
- Je ne vous ai jamais détesté. Je ne vous aimais pas, et c’est différent.
Nos deux visages ne laissaient trahir en aucun cas nos vraies émotions, cette neutralité et cette froideur qui se dégageaient d’eux ne faisaient que rendre les choses encore plus attrayantes.
DuThoit jeta un coup d’œil furtif vers la feuille dont laquelle j’avais gribouillé l’introduction pour ma dissertation, il a tout de suite su de quoi il s’agissait.
- Je pourrais jeter un coup d’œil ?
- Non. Sinon à quoi cela servirait de la recopier au propre puis de vous la remettre la semaine prochaine ?
- Peut être pourrais-je t’aider…
- Je connais déjà mon souci existentiel. Je vous remercie pour votre aide en tout cas (en lui adressant un sourire enfantin)
- Tu gardes toujours quelques émotions pures…
- Peut être est ce une part de mon souci existentiel.
- C’était un compliment.
Je l’ai juste regardé profondément avec un très léger sourire au coin des lèvres.
- Que compte tu faire ce soir ?
- Terminer ma dissertation. Je ne veux pas avoir du travail à faire pendant le week-end.
- Tu as un programme alors ?
- Pas vraiment.
- Tu devrais peut être accepter.
- Accepter quoi au juste ? (avec un ton qui frôlait à peine le mécontentement)
- Je ne peux pas éviter ce sujet plus longtemps.
- Je ne veux pas parler d’elle maintenant. Je ne veux pas gâcher la soirée.
- Tu le devrais pourtant. Tu ne peux pas fuir, et tu le sais. Joe, tu dois l’affronter.
- Pourquoi me proposer alors d’accepter ?
- Pour l’affronter. Si tu accepte de partir avec elle, au moins ce week-end là bas, toutes les deux, vous allez régler vos différents
- Vous connaissez fort bien son tempérament, d’ailleurs, vous en avez eu un avant goût cet été.
- Et c’est exactement pour ça que je voudrais que tu acceptes son invitation. Le départ n’est pas une solution.
- Je ne lui demande rien, son argent je ne l’accepte pas, ce que je veux c’est la paix…
- L’as-tu cette paix ? De cette manière ? Tout ce que tu as fait est fuir en laissant enfoui tout ton passé, en reniant ce qui te liait à elle.
- Ca me va pour l’instant.
- Paroles.
- Je vous assure que je ne me suis jamais sentie aussi à l’aise depuis qu’il…
- Tu lui en veux pour tout ce qu’elle t’a fait…
- Ne me faîtes pas passer pour une martyre, je n’aime pas ce rôle. Tout le monde souffre d’une manière où d’une autre. Je n’arrive plus à accepter ma vie avec elle, c’est pour ça que je suis partie, non pas parce que je suis une martyre ou que je subissais ses supplices.
- Il faudra quand même en parler avec elle.
- Peut être une autre fois, dans une semaine, dans un mois ou dans des années…
- Je ne veux pas que tu gardes cette haine… Je ne veux que ton bien (en me tenant la main sur la table)
J’ai retiré ma main en me servant de la cigarette comme prétexte, mais vu que c’est DuThoit, il me dit :
- Dès que je te parle d’elle, tu m’évites, même du regard… Me déteste tu aussi en te parlant d’elle ?
- Je n’arriverais pas à le faire même si je le souhaitais. (en souriant avec supériorité)
- Cette expression de ton visage… (en me caressant la joue)…
- Qu’est ce qu’elle a ?
- Oublie.
En fait, je n’arrivais pas à donner à notre relation une étiquette bien déterminée, je n’arrivais pas à dire ce que nous étions l’un pour l’autre précisément, et peut être que c’est pour cette raison qu’on se trouve là, dans ce café, avec une cigarette chacun entre les doigts…
Je me rappel que lorsque j’avais terminé mon premier cour de philosophie l’année dernière, j’étais partie avec des amis à ce même café que DuThoit côtoyait. Lorsque son heure habituelle – environ 20h30 – est arrivée, il est entré pour aller s’assoire à sa table. Sans lui demander ce qu’il voulait boire, le serveur lui a directement apporté son expresso Lavazza. Il prit une cigarette du paquet, puis l’alluma. Il portait un jean noir simple et une chemise noire tout aussi simple, son style habituel, même à l’Université.
Je n’arrivais pas à m’empêcher de le regarder, parce qu’il m’intriguait toujours ; pour moi, il représentait une énigme, un mystère que je devais résoudre… et pas uniquement ça, peut être plus, même à cette époque où je ne l’appréciais pas, sûrement à cause de mon premier cour avec lui.
Quelques instants après, il m’avait aperçu ; j’étais avec trois amis : Shannon, Chris et Cole. Cole m’enlaça en voyant que les regards de DuThoit se dirigeaient à présent vers moi. DuThoit continua à me regarder. Cole, gêné, m’avait dit :
« - Qu’est ce qu’il a à te regarder celui là ?
- C’est mon prof de philosophie.
- Ah bon ? Il est nouveau ?
- Oui. Tu n’es pas entré aujourd’hui, tu ne l’as pas vu.
- Non mais quel prétentieux il fait ! (lui dit Shannon)
- C’est vrai. Il a dit que tout ceux qui veulent sortir qu’ils le fassent, et il leur donnera une note de 10 (lui dit Chris qui caressait le visage de Shannon)
- Pourquoi tu n’es pas sorti alors ? (me dit Cole)
- Il m’a retenu.
- Il a le droit ?
- Je n’en ai aucune idée. En tout cas, je sens que ce n’est pas un prof ordinaire. D’ailleurs, il nous a demandé…
- Oh, épargne nous son cours, on est sorti pour éviter ça justement ! (me dis Shannon) »
Je m’étais alors tue. Je pris une cigarette mais je me rendis compte que je n’avais pas de feu. Shannon détestait les femmes qui fumaient, elle me disait toujours qu’elles perdent leur féminité ; Chris n’était pas un fumeur, son type est plutôt le gentil gars qui veut se faire passer pour un cool ; quant à Cole… Que vais-je dire de lui maintenant ? C’était quelqu’un de vraiment bien, vraiment. Il essayait d’arrêter de fumer, ce qui fait qu’il n’avait pas de feu.
Je suis allée chez le serveur qui se trouvait à deux tables de celle de DuThoit, en lui demandant du feu, DuThoit m’appela :
« - Johanne ! »
J’étais plutôt surprise qu’il se rappel de mon prénom (même s’il savait que je détestait mon prénom), et ce qui m’étonna encore plus c’est qu’il m’ait remarqué, tout à fait comme j’avais fait depuis la première fois que je l’avais vu dans ce café.
Je me suis approchée de sa table, il m’a tout simplement tendu du feu ; j’allumai ma cigarette puis je voulu partir.
« - Tu peux rester si tu veux
- Je… ne vous… dérangerais pas ?
- Pourquoi dis tu cela ?
- Et bien, vous vous assoyez chaque soir seul, peut être en méditant, et si je m’assois je dérangerais le cours de vos pensées.
- Tu médites aussi, même en étant entourée, comme tu as fait chaque soir dans ce café même, n’est ce pas ? »
Je m’étais assise, vu que la discussion semblait à peine commencer…
« - Tu ne viens pas souvent avec ces gens là, n’est ce pas ?
- Vous avez raison. Ils n’aiment pas ce café.
- Tu l’aimes ?
- Oui, je le trouve bien, je m’y sens à l’aise »
Il sourit. Je compris alors que peut être il ne me parlait pas du café, mais de Cole. Je rougis un tout petit peu, et il eut encore un sourire.
- Tu t’es évadé ? (me dis DuThoit)
- Oui (en souriant avec nostalgie)
- A quoi pensais tu ?
- A notre première discussion dans ce café.
- Elle était brève, n’est ce pas ?
- Oui, mais pleine de sens.
- Ne dit on pas que le silence est la mère des langues !
- C’est vrai. On était resté à ne rien dire, mais on communiquait.
J’ai jeté un coup d’œil à ma montre.
- C’est 21h45. (me dis DuThoit)
J’ai souri. Il prédisait chacun de mes gestes, il devinait chacune de mes pensées.
- Partons si tu veux
On s’est séparé à la porte du café. Il voulait m’accompagner, ou me déposer avec sa grosse bécane mais je voulu marcher, seule, pour penser à ce que j’allais faire avec elle…
Je m’étais approchée de mon immeuble, un vieux et grand immeuble qui contient 35 appartements. Je n’oserais pas dire que tout le monde le trouvait beau, loin de là, mais moi je le trouvais ainsi. Je m’y sentais à l’aise et c’est ce que tout le monde cherche. J’avais un tout petit appartement de deux petites chambres, un hall qui servait de salle à manger et une salle de bain avec baignoire. Ca me suffisait amplement. J’étais au dernier étage, et même s’il n’y avais pas d’ascenseur je ne m’en plains pas. La vue qu’offrait le hall ainsi que les chambres était magnifique, on pouvait voir toute la ville et la forêt qui l’entourait. C’était tout simplement beau comme a dit DuThoit lors de sa première visite chez moi.
J’ai pris cet appartement il y a à peine un mois, juste après ma crise avec elle. Je n’en pouvais plus et donc je suis partie. C’était très difficile pour moi de trouver un appartement avec un prix convenable, aussi je ne pouvais m’offrir un appartement en centre ville vu que je n’en ai pas les moyens.
Je refusais chaque chose venant d’elle, même son argent, je l’ai refusé à maintes reprises. Pour pouvoir vivre, j’ai trouvé un travail après l’université : je suis assistante dans un bureau d’étude spécialisé en Marketing et Management. Il faut dire que ce travail m’aide à rester à jour sur ce qui se passe réellement dans le monde de l’entreprise, et non uniquement se contenter des cours théoriques. Malgré ça, je n’ai pas un très bon salaire, vu que ce n’est qu’un travail à mi-temps (je ne travaille que 4heures par jour), mais ça me permet de vivre et de payer mon loyer sans recourir à ses aides financières.
Cole, lui, n’avait pas aimé mon appartement, il m’avait proposé d’aller vivre avec lui sans payer de loyer vu que ses parents lui avaient offert la maison dont laquelle il vivait, mais j’ai bien sure refusé, je ne me permettrais jamais de vivre sur les frais de qui que se soit, même DuThoit…
En parlant de Cole, il m’appelle toujours. C’est quelqu’un de bien. Il s’accroche encore et sans relâche ; j’admire en lui cette vertu : se battre jusqu’au bout pour avoir ce qu’il veut.
A la maison, j’ai pris la feuille où j’avais transcrit l’introduction pour la continuer ; je cherchais un stylo, puis je me suis mise à écrire :
« Les gens sont tellement hypocrites ; je ne comprend vraiment pas comment ils peuvent garder le sourire devant quelqu’un qu’ils détestent plus que tout ; ils arrivent même à rire avec cette personne en sachant qu’ils se détestent mutuellement ! Et cette capacité de cacher leur souffrance, leurs problèmes et continuer à jouer cette comédie minable de la vie parfaite devant les gens est vraiment incroyable. Des fois, j’arrive même à admirer ces hypocrites, car pour moi ce n’est pas facile de rire lorsque j’ai envie de pleurer, ni de sourire lorsque je suis triste… Je suis quelqu’un de vrai, qui recherche des sensations et des émotions vraies ; et voici là un autre sous souci existentiel.
Peut être que ce qui nous a été demandé dans cette petite dissertation n’est pas d’exprimer nos soucis ou nos sous soucis, mais d’écrire sur un seule et unique souci, NOTRE souci existentiel ; j’avoue que c’est très difficile pour moi d’en trouver un seule, et je résumerais donc que mon souci existentiel est la somme de tous mes soucis ; mais quels soucis ai-je donc dans cette vie ? Je répondrais avec la simplicité dont ma personnalité se caractérise (et en voici un autre sous souci existentiel) : mon souci existentiel est mon existence elle-même. »
Minuit passé, je me trouvais sur le lit, allongée sur mon dos, regardant le plafond… Je pensais en fait à ce que m’avait proposé DuThoit, d’accepter. Aurais-je assez de cran, assez de courage pour pouvoir rouvrir les plais dont je n’avais pas encore guéri ? Cela ne fait qu’un mois que je suis là, pourrais-je l’affronter de ci tôt ?
Mon portable sonna. Je commençais à détester ces téléphones qui nous sortent de notre précieux monde de pensée… C’était le numéro de Cole.
- Allo
- Akira… je ne te réveille pas au moins ?
- Non, j’étais réveillée.
- Je… suis en bas, est ce que je pourrais monter te voir ?
- Oui, si tu es en bas
- D’accord, je monte.
Je ne sortais plus avec Cole, depuis cet été. Ca fait de cela environ 6 mois. Il était quelqu’un de bien, mais ça ne servait à rien de me mentir moi-même et de lui mentir aussi en restant avec lui… J’avais continué avec lui pendant toute l’année dernière, l’année pendant laquelle j’ai connu DuThoit, et je continue à le connaître. Même pour Cole c’était bizarre ; à chaque fois où il m’appelait pour me voir, j’étais avec DuThoit, soit à notre café, soit chez lui.
Cole frappa discrètement à la porte. Je me suis levée doucement du lit et suis allée lui ouvrir. Bien sûre il était très bien habillé, comme toujours, bien soigné, bien rasé, bien coiffé… ainsi que tous les qualificatifs qui peuvent rejoindre le mot « bien », alors que moi j’étais en caleçon avec des nounours comme motifs et un débardeur blanc… Il m’a embrassé sur la joue.
- Mais entre Cole.
- Tu es sure que je ne te dérange pas, n’est ce pas ? (en entrant)
- Oui, oui, j’étais encore réveillée.
- Je… passais par là, et je m’étais dit de passer te faire coucou.
- C’est gentil de ta part. Que veux tu boire ? (en ouvrant le réfrigérateur qui était au hall) Une bière ? Limonade ? Thé glacé ?
- Je ne prendrais rien, merci.
- Allez Cole !
- Que prendras tu ?
- Une bière. Tu as envie de prendre une avec moi ?
- Oui, alors une bière.
Je lui ai tendu une bière et j’en ai pris une. Mon paquet de cigarette était sur la table, j’en ai pris une, et j’ai tendu une à Cole.
- C’est dommage que tu as repris, tu ne fumais plus pendant un an.
Cole avait repris depuis qu’on s’était séparé, mais je ne l’ai su qu’après. Il ne voulait tout de même pas que je me sente coupable car je l’ai laissé tomber… Je pense encore que j’ai fait le bon choix, il n’était pas heureux avec moi, avant même que je ne connaisse DuThoit, et après ça avait empiré.
- Akira ?
- Pardon, tu disais ?
- Non, rien.
- Excuse moi s’il te plait. Je pensais à un truc.
- A DuThoit ?
- Non. (en reprenant une autre cigarette)
- Akira… Tu ne voudrais pas voyager ce week-end ?
- Je ne sais pas encore… Peut être que je devrais aller chez… elle.
- Ta mère ?
- Oui. (en joignant mes pieds à mes mains)
- Elle t’appelle toujours ?
- Oui. Elle veut que je parte avec elle ce week-end en Espagne.
- L’Espagne est un joli pays.
- Je ne sais pas si je peux la revoir.
- Ne t’oblige pas.
- DuThoit m’a dit qu’il fallait que je l’affronte pour régler nos différents.
- Bien sûre, DuThoit t’a dit !
- Ne sois pas si agressif s’il te plait. Je ne faisais que te raconter.
- Je suis désolé. Je trouve que c’est trop tôt… Après tout ce qu’elle t’a fait, ce n’est pas facile de la revoir après un mois que tu as quitté la maison.
- Je ne sais vraiment pas quoi faire. Je voudrais l’affronter, lui dire tout ce que je pense, sincèrement. Je ne lui avais rien dit avant. J’avais tout simplement dit que je partais vivre ailleurs.
- N’accepte pas ce voyage, il est encore tôt. Viens plutôt avec nous, on pars ce week-end à l’Ille, pour nager…
- Mais on est encore en Avril…
- Et alors ?
- La mer, ça ne me dis rien, tu le sais (en souriant), je préfère les montagnes.
- Ca te changera les idées. Allez, viens avec nous.
- Je ne pense pas Cole. (en souriant gentiment)
- Tu veux peut être passer ce week-end avec DuThoit, en amoureux
- Tu ne comprends pas Cole… On ne sort pas ensemble…
- Tu sors avec lui, tu passes des soirées entières avec lui, tu pars chez lui et tu y passes la nuit, et tu t’attends à ce que je croie que tu n’es pas sa petite amie ?
- Oui, je ne nie pas tout ceci, mais cela ne veut pas dire que je suis sa petite amie.
- Alors il passe du temps avec toi, c’est tout.
- Ecoute Cole, je ne pourrais pas t’expliquer ce qui est entre nous, vu que moi-même je ne sais pas. Ce dont je suis sûre c’est que je ne suis pas sa petite amie, et il ne se joue pas de moi, car on n’a rien fait.
- Ca fait une année et demie que vous vous connaissez, et depuis l’été tu es libre, alors ne me dis pas qu’il n’a pas couché avec toi !
- Cole, tu sais très bien que je ne vais pas me justifier devant toi. Crois ce que tu veux, je n’ai pas à prouver quoi que se soit.
- Tu m’as quitté pour lui…
- Non, on s’est séparé car je ne te sentais pas heureux avec moi, même avant que je ne connaisse DuThoit, et après que je l’ai connu, j’ai réalisé que je me mentais moi-même et je te mentais toi aussi, car je n’étais pas amoureuse de toi, je t’aimais bien, oui, tu m’étais très cher, mais je n’étais pas amoureuse de toi, c’est pour ça que j’ai arrêté le carnage…
- Le carnage ! Ton humour noir apparaît toujours ! Le carnage c’est ce que tu m’as causé après notre séparation, que DuThoit a bénît, car le champ lui serait libre !
Mes regards s’étaient attristés, j’ai posé ma tête sur mes genoux que je tenais toujours entre mes bras. Quelques instants après, après que Cole ait réalisé ce qu’il m’avait dit, il s’approcha de moi en me serrant contre lui.
- Je suis désolé Akira… Ne m’en veux pas s’il te plait.
Je ne lui répondais pas. Je me disais tout simplement que peut être il avait raison, que le carnage était après la séparation, et non pendant la relation… Peut être devais-je rester avec lui… Peut être n’avais je pas fait le bon choix après tout… Ce que j’ai voulu éviter s’est passé quand même… Après 6 mois de séparation, il éprouve encore ce sentiment que je voulais lui éviter.
- Ce n’est pas grave.
- Je… Je ne voulais vraiment pas dire tout ça…
- C’est important d’exprimer ce qu’on ressent vraiment, de dire ce qu’on pense réellement.
- Peut être qu’il ne fallait pas que je passe ? (en s’éloignant de moi)
Je levai la tête en le regardant tristement.
- Tu veux couper contact avec moi ? Tu ne veux plus me parler ?
- Peut être que comme ça, je ne te ferais plus souffrir.
- Arrête de vouloir me protéger tout le temps ! C’est moi qui ne veux pas que toi tu souffres, parce que tu m’es très cher…
- Akira, je souffre maintenant. J’étais bien avec toi…
- On se mentait à nous-même Cole, tu n’étais pas heureux…
- Je ne l’étais pas car tu ne l’étais pas avec moi ! Car tu étais si malheureuse, car tu avais des problèmes…
- Cole, cette discussion n’arrangera rien…
- Je maudis ce prof et je maudis le jour où tu as assisté à son maudit cour de malheur ! Quand je pensais que tu allais partir avec moi au café ce jour là, mais que tu as changé d’avis à la dernière minute !
- Peut être que ce n’est pas à cause de DuThoit…
- Tu le défends toujours et ça me tue ça ! Tu ne me laisses même pas insulter l’homme à cause de qui je t’ai perdu.
- Lui, il ne te hait pas.
- Il n’a pas de raison pour le faire.
- Cole, ne t’empoisonne pas la vie ainsi, tu es un bon vivant, alors vis.
Il s’est levé pour se diriger vers la porte. Il l’ouvrit et avant de sortir il me dit :
- Je ne vis pas, je respire seulement.
Il a claqué la porte en me laissant ainsi. Je regardais encore la porte longtemps.
Après la séparation, Cole évitait toujours qu’on parle de ça, qu’on parle de DuThoit, au point même que quand on était au café, le soir, il sortait dès qu’il apercevait DuThoit rentrer, de telle sorte à ce qu’il n’ait pas à le saluer ou même à le regarder. Ces derniers temps, il en parle plus souvent… Je ne sais pas exactement ce qu’il veut, ce qu’il cherche en m’en parlant, peut être qu’il fait ce que je voudrais faire avec elle, dire tout ce qu’il pense, pour pouvoir oublier la survie et vivre de nouveau…
Il fallait que je le fasse, je le devais, et je pense que ça ne sert à rien de retarder ma confrontation avec la femme qui est ma mère, mais qui a très mal rempli sa mission.
C’était une heure du soir, et pourtant j’ai pris le téléphone et j’appelai ma mère.
- Allo…
- C’est moi…
- Johanne ma chérie…
- Je suis désolée si je t’ai réveillé…
- Oh mais non, pas de problème…
- Je voulais juste te dire que je viendrais avec toi demain en Espagne.
- Ca me fait énormément plaisir que tu ais accepté. On passera un week-end merveilleux en deux célibataires.
- Quand est ce qu’on se voit à l’aéroport ?
- Non, non, je passerais te prendre de chez toi, dis moi juste où tu habite.
- Je n’ai pas de problème, un ami va me déposer.
- Bon, d’accord. Notre avion décolle à 9h du matin. Assure toi d’y être minimum une demie heure avant.
- D’accord.
Je n’avais pas du tout dormi cette nuit, je n’arrivais pas à fermer l’œil vu que ce qui se passera ce week-end me hante déjà. Le soleil s’était déjà levé, il était 8h maintenant. Je n’avais rien pris avec moi, juste un sac à dos dans lequel j’avais mis ma trousse à toilette, un pyjama et un pull de rechange. Je ne pris pas de maillot, je ne souhaitais pas nager, je n’avais aucune envie de m’amuser, juste de régler ce que j’avais à régler… Je l’imagine déjà qui me demande, avec son sourire qu’elle essaye de le forcer à devenir innocent, pourquoi je n’ai pas ramené de maillot !
J’ai pris le téléphone pour appeler DuThoit :
- DuThoit
- Joe ! Bonjour.
- Je ne vous dérange pas au moins…
- Joe, tu lui as parlé, n’est ce pas ?
- Oui.
- Elle t’a appelé ?
- Non, c’est moi. Je lui ai dit que j’étais d’accord.
- Tu as bien fait. Ca va t’aider… Même si j’aurais aimé que je sois avec toi lors de ta discussion avec elle.
- Tu le penses vraiment ?
- Oui. Je voudrais te protéger d’elle, de l’empêcher de te faire encore plus de mal. Je veux que tu sentes qu’il y a quelqu’un qui te supporte contre elle.
- On prendra l’avion de 9h.
- Je viens te chercher ?
- Ca ne te dérangerait pas ?
- Pas du tout. Je viens.
Il était sûrement en route maintenant. J’aurais tellement aimé qu’il vienne avec nous, je me sentirais plus confiante car il est là, avec moi, à mes côtés. Mais est ce vraiment possible ?
Lorsque DuThoit a klaxonné, je suis descendue en emportant mon sac à dos et en jetant un regard attristé à ma maison que j’aimais tellement.
DuThoit portait un sac à dos aussi, je le regardais avec une joie que je n’arrivais pas à cacher.
- Oui, je pars avec toi. Pas question de te laisser seule avec elle.
J’ai souri d’apaisement, puis je l’ai serré contre moi, comme une fille pourrait serrer son héro.
Elle m’attendait devant la porte conduisant à l’avion ; elle ne m’avait pas encore aperçu, elle nous donnait le dos. J’avais de plus en plus peur d’avancer vers elle, et les souvenirs commencèrent à refaire surface. DuThoit me tenu la main comme pour me donner de la force.
Nisrine
Comments:
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salut
je n'ai pas lu tout le texte désolé, faute de temps et de bien d'autres choses, mais je pourrai dire que ( en tout cas ce que j'en ai lu) c'est trés sincère et touchant je te "on se permet bien le TU ici je suppose" n'empêche que je te souhaite bonne continuation.
"On n'éclaire pas les âmes avec les bûchers" DIDEROT.
je n'ai pas lu tout le texte désolé, faute de temps et de bien d'autres choses, mais je pourrai dire que ( en tout cas ce que j'en ai lu) c'est trés sincère et touchant je te "on se permet bien le TU ici je suppose" n'empêche que je te souhaite bonne continuation.
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